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Le blog

Bangkok – 10-11 Janvier 2014

De Bangkok à Chiang Mai, en train

Il y a des jours où l’on se dit qu’on aurait mieux fait de rester couché. Mais parfois on n’a pas le choix et cette longue journée de voyage vers Chiang Mai connaît un nouveau regain de tension.

Deux heures avant son départ, le train de Chiang Mai est déjà à quai.  Nous en profitons pour embarquer tranquillement et nous installer, avant que ce soit la cohue.  Le chef de wagon nous indique que le wagon est réservé pour un groupe. Mais après avoir  vérifié nos billets, il nous confirme nos places : les deux couchettes supérieures 29 et 31.

Pour ceux qui ne connaissent pas les trains thaïlandais, il faut préciser que ces wagons couchette ne sont pas divisés en compartiment, mais qu’ils s’organisent le long d’une travée centrale, de chaque côté de laquelle on trouve des alcôves regroupant deux banquettes en vis-à-vis. Chaque groupe de banquettes correspondant à une couchette supérieure et une couchette inférieure qui seront installées par les employés du train vers 8 heures du soir.

Dans le train Bangkok - Chiang-Mai
Dans le train Bangkok – Chiang-Mai

Le principe est simple et compréhensible par un enfant de 4 ans. Donc à fortiori par des adultes, d’autant plus lorsqu’ils sont thaïlandais. Mais il y a toujours une exception qui confirme la règle. Et ce jour-là, l’exception prend la forme d’un groupe de locaux en voyage organisé, qui débarque avec armes et bagages, une demi-heure avant le départ du train et envahit le wagon.

En théorie, nous aurions dû nous installer chacun sur la banquette correspondant à notre couchette. Mais lorsqu’on voyage en couple, on préfère se retrouver en vis-à-vis, plutôt que de chaque côté d’un couloir. Nous occupons donc les banquettes 29 et 30, au lieu des 29 et 31 qui correspondent à nos billets. Mais il est bien entendu que lorsque les couchettes seront installées, nous occuperons les deux couchettes supérieures. C’est ce que j’explique avec courtoisie à un membre du groupe qui semble vouloir s’installer à côté de nous.

L’homme ne comprend sans doute pas bien l’anglais, ou alors je me suis mal exprimé. Toujours est-il qu’il rameute un des responsables du groupe auquel je réexplique patiemment la situation. Sans résultat aucun. L’homme part s’installer plus loin, aussitôt remplacé par une mère et sa fille, plus le mari qui ne part pas mais qui est monté dans le wagon pour porter les bagages. Nouvelle remarque sur les places que nous occupons. Nouvelle réponse, un peu moins courtoise, de ma part. Et très vite le ton monte. Le mari qui n’a décidément rien compris prend la défense de sa femme qui n’a pas plus compris que lui. Je hausse le ton pour attirer l’attention d’un contrôleur qui est à l’entrée du wagon. Tout le monde est debout, on parle très fort ; on est à deux doigts de la bousculade.

Sur ce le contrôleur arrive ; je lui expose la situation qu’il comprend immédiatement. Il fait ensuite une explication de texte en thaïlandais au couple irascible, qui finit par se résigner et se calmer. La femme s’installe avec sa fille de l’autre côté du couloir central. Le mari descend sur le quai et restera là jusqu’au départ du train pour s’assurer que nous ne dérangeons pas sa charmante épouse. Charmante épouse, qui a posé ses 150 kg de chair flasque sur la banquette et qui manipule compulsivement son smartphone.

Enfin à 18 h 30, le train quitte lentement la gare, pour revenir à quai vingt minutes plus tard. Il en repart un quart d’heure après sans aucune explication. Dans notre wagon, on n’a pas attendu le moment du départ pour attaquer le dîner ; les serveurs du wagon-restaurant s’activent sans relâche pour servir le dîner à ce groupe de 5O personnes. C’est une noria de plateaux, chargés à ras bord de plats sous cellophanes, de bols de soupes et de verres de jus de fruits, qui défile sous notre nez. En face de nous, notre voisine s’est calmée ; elle a déjà vidé deux paquets de chips et s’attaque à présent à son repas, sans lâcher son mobile. C’est le moment d’aller dîner ; nous rassemblons nos sacs pour partir au wagon-restaurant, situé deux voitures plus loin. Mieux vaut ne pas être dans les environs lorsque les employés du train installeront les couchettes pour la nuit.

A l’exception d’employés qui s’activent à préparer des plateaux de repas qu’ils iront ensuite servir dans d’autres wagons, le restaurant est désert. Nous choisissons donc notre table et la serveuse nous apporte le menu. Après notre expérience du train de Yangon à Mandalay, on redécouvre avec plaisir le confort des trains thaïlandais, le choix des menus et la carte. Ici le dîner coûte à peine plus cher que dans un petit restaurant en ville et on pourra manger normalement sans être secoué comme si l’on était sur un trampoline. Curry de poulet, légumes sautés, riz, soupe…, notre commande arrive rapidement sur la table, accompagnée d’une bière locale. Enfin un moment de détente dans ce voyage mouvementé.

Une heure plus tard, nous revenons à notre wagon, en espérant que le groupe s’est déjà installé pour la nuit. Fort heureusement c’est le cas ; de chaque côté du couloir central, les banquettes ont été converties en larges couchettes, et les couchettes supérieures ont été ouvertes. Chacune disposant d’un rideau qui permet de s’isoler. Nous déambulons donc dans un couloir bordé de chaque côté par deux rangés de rideaux bleus, plus ou moins ouverts, jusqu’à nos couchettes. Là encore, le confort n’a rien à voir avec celui des trains birmans. Chaque couchette dispose en effet d’un oreiller et d’une couverture qui sortent tous les deux de la blanchisserie.

La nuit sera calme, du moins jusqu’à 5 heures du matin, heure à laquelle quelques membres du groupe commencent à s’agiter. A 6 heures, tout le monde est déjà debout, à attendre le petit déjeuner qui ne sera servi que vers 7 heures. Cinquante personnes qui papotent, même à voix basse, cela fait du bruit, suffisamment pour réveiller les deux seuls touristes du wagon qui espéraient pouvoir dormir encore un peu.

Du coup, nous nous levons et partons prendre un café au wagon-restaurant, pendant que les employés du train commencent à fermer les couchettes des voyageurs qui sont vraiment levés. Bonne idée, car le train a pris du retard et nous ne serons pas à Chiang Mai avant 9 h 30. La bonne surprise, c’est que nos amis nous quitteront avant le terminus ; leur périple s’arrête à Lamphun, à 60 km de Chiang Mai.

Ensuite, comme d’habitude, c’est l’attente de l’arrivée. Sur les longs (ou moyens) trajets, je ne connais pas un train qui arrive à l’heure. Les trains chinois ont la réputation d’être ponctuels, mais dès qu’on parcours plus de 2000 kms, ce qui se fait facilement en Chine, les trains ont souvent une ou deux heures de retard. Au Vietnam, c’est pareil, l’Express de la réunification qui relie Saigon à Hanoi à fréquemment une heure de retard. Quant à la Thaïlande, les trains qui ont pour terminus la gare centrale de Bangkok n’arrivent jamais à l’heure. Il suffit de le savoir et prendre son mal en patience.

Finalement, il est un peu moins de dix heures lorsque notre train s’arrête à son terminus, la gare de Chiang Mai. Nous aurons mis un peu plus de 24 heures pour relier Yangon à Chiang Mai.