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Le blog

Chronique de Zhanjiang 11

Une visite au marché de Zhanjiang

Quand on préfère cuisiner, on fait ses courses au marché. Mais pour ça, il vaut mieux parler et comprendre le putong hua (le mandarin) ou le dialecte local. Sans quoi on risque de payer beaucoup plus cher que les autochtones et de se faire refourguer un produit de mauvaise qualité. Bref, pour moi le marché reste un lieu de balade, un endroit où faire des photos, et éventuellement, acheter quelques fruits. Mais comme tous les marchés dAsie, ceux de Zhanjiang valent de détour, et lorsque je reviens du parc, après ma séance de toupie chinoise, je ne manque jamais de traverser celui qui se trouve à côté de chez nous.

La première allée est réservée à la volaille vivante, mais comme le marché dispose de deux entrées donnant sur deux rues différentes, suivant le côté par lequel on y entre, on trouvera d’abord quelques marchands de tabacs et d’herbes aromatiques, puis les plumeurs de volailles. Ceux-là travaillent accroupis dans des boxes entourés d’un muret de 60cm revêtu de carrelage blanc, qui font furieusement penser aux toilettes publics de certaines aires d’autoroute et de quelques vieux marchés de Beijing. Enfin, on trouve les vendeurs de poules, de canards et de pigeons, avec parmi eux, quelques vendeurs de serpents. Bien entendu, dans cette allée, tous les animaux sont parqués dans des cages et vendus vivants. Si vous achetez une poule, le marchand lui liera les pattes et vous la remettra telle quelle. A vous ensuite de vous débrouiller pour le transport et la préparation. De même, si vous achetez un serpent, on le glissera, vivant, dans un sac en plastique comme un vulgaire chapelet de saucisses.

Dans la seconde allée, on trouve les fruits et les légumes. D’abord les légumes. Ceux que tout le monde connaît, comme les carottes, les courgettes, les pommes de terre ou les tomates, et ceux qu’on ne trouve qu’en Asie, comme le « bitter cucumber », une sorte de concombre au goût amer, ou bien le taro, une variété d’igname long de soixante centimètres. Plus loin, ce sont les légumes verts : épinards, salspareille, blettes, salades, et bien d’autres qui ne dispose que d’un nom chinois pour les identifier. Mais pas question pour autant de préparer une belle salade verte avec une sauce vinaigrette ; pour des raisons d’hygiène, on mange ces produits bouillies, sautés, cuits à la vapeur ou dans la soupe.

Du côté des fruits, on se retrouve en terrain connu, même si la poire chinoise n’a que peu à voir avec sa cousine européenne. Ici, c’est d’ailleurs un produit de luxe qu’on peut apporter lorsqu’on est invité à prendre le thé dans la famille ou chez des amis. Mais au-delà des poires, pommes et oranges, il y a bien sûr des bananes qui feraient honte à tous les producteurs des Caraïbes, et tous les fruits « exotiques » : mangues, papayes, fruits du dragon… et ces gros « pamplemousse » dont l’écorce fait deux centimètres d’épaisseur qu’on nomme ici « youzhi ». Les ananas font aussi partie de la production locale mais on les trouve plutôt chez les vendeurs de rue qui vous épluchent le fruit en un tournemain.

Enfin, lorsqu’on s’aventure dans la dernière allée, on découvre les vendeurs de poissons et autres coquillages. Attention, ça glisse. Il y a abord les vendeurs d’huîtres de Zhanjiang qui passent leurs journées à ouvrir des huître, noires de vase et grosses comme le poing. En effet, la ville est située sur l’estuaire du fleuve où sont installés de nombreux parcs à huitres. Mais attention, rien à voir avec l’huître de Cancale ou celles du bassin d’Arcachon, il s’agit ici d’huîtres grasses et charnues qu’on ne mange que frites, sautées ou cuites à la vapeur (raisons d’hygiène, encore une fois). Le mieux étant bien sûr de les faire cuire sur la braise, dans leur coquille, assaisonnées d’ail et de piment. Ce que proposent certains petits restaurants plus ou moins clandestins qui se sont installés sur les toits de la ville.

De l’autre côté de l’allée, ce sont les vendeurs de poissons et de crevettes. Et si l’on pousse un peu plus loin, on trouvera quelques stands qui vendent des gros vers dont le diamètre est proche de celui d’une saucisse à hotdog et qui une fois vidés, nettoyés et cuits, se mangent en salade. Enfin, j’allais oublier de parler de l’estomac de poisson séché. Si vous voulez vraiment faire plaisir à un ami chinois, offrez-lui un estomac de poisson séché. Attention, c’est un produit de luxe qui, contrairement à la poire, se vend parfois très cher. On en fait une soupe dont les gourmets se délectent, mais pour en avoir déjà gouté dans un restaurant chic lors d’un repas du Nouvel An, je sais que pour un palais occidental, ça ressemble davantage à un morceau d’éponge insipide !

Pour terminer le tour du marché, il faut aller faire un tour dans le carré des bouchers. C’est là qu’on débite la viande fraîche à grand coups de hachoir. En début de matinée ou en fin de journée, on y rencontre des ménagères qui tâtent et soupèsent les morceaux de viandes posés à même le comptoir carrelé, et les spécialistes de la volaille qui vous tranchent d’un coup de hachoir un poulet en deux moitiés. D’ailleurs, ces poulets sont des poules. Pas besoin d’être un spécialiste pour l’affirmer ; il suffit de jeter un œil sur ces demi-carcasses, fraichement tranchés, pour y découvrir une multitude d’œufs à différents stades de maturité: du chapelet d’œufs pas plus gros qu’une groseille, jusqu’à l’œuf de la taille d’une prune. Ces œufs sont vendus avec le poulet, tout comme les pattes, la tête, l’estomac et tout le reste.

A proximité, on trouve les incontournables vendeurs de poulets et de canards cuits. Ces derniers officient dans des boxes vitrés où pendent les volailles cuites et vous débitent un demi-poulet ou un quart de poulet en quelques secondes. C’est dans ce genre d’échoppe qu’on se fournit lorsqu’on veut manger du poulet ou du canard à la maison ; les poulets crus étant, eux, vendus essentiellement pour la soupe. Pour ceux qui préfèrent le porc « toasté », il y a deux ou trois échoppes qui en vendent sur le marché. Quant aux amateurs de chiens, ils devront sortir du marché pour acheter leur viande favorite. En effet, les vendeurs de viande de chien sont relégués à l’extérieur du marché, tout comme les personnes nées sous le signe du Chien qui ne sont pas les bienvenues dans une maison où on prépare un mariage. Mais j’aurais l’occasion d’en reparler dans un autre billet.