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Le blog

Chronique de Zhanjiang 13

Une escapade au Vietnam

Quand on vit dans le sud de la Chine, on est à deux pas de l’Asie du sud-est, Vietnam, Laos, Cambodge ou Thaïlande, et on se laisserait facilement tenter par une petite semaine dans l’un de ces pays. En France, il suffit de sauter dans un TGV ou de prendre un vol low-cost et en quelques heures, on se retrouve à Londres, Bruxelles, Barcelone ou Rome. A Zhanjiang, on est à 400 km de la frontière du Vietnam, un peu plus de la frontière du Laos et à deux heures d’avion de Bangkok mais on a ni TGV, ni compagnies low-cost. Il faut donc soit aller à Guangzhou pour prendre l’avion, soit prendre le train. Dans un sens comme dans l’autre, la durée du voyage s’en trouve considérablement rallongé : si on décide de partir en avion, il faudra compter 6 ou 7 heures de bus pour rejoindre Guangzhou, plus une heure de taxi ou de bus pour rejoindre l’aéroport. Si l’on opte pour le train, il faudra passer par Nanning qui est à 7 heures de train de Zhanjiang. A condition d’avoir un visa.

En préparant mon escapade au Vietnam, j’avais déjà prévu de prendre le train de Nanning à Hanoi, et je pensais naïvement que l’obtention d’un visa pour le Vietnam ne poserait pas de problème dans une grande ville comme Zhanjiang où l’on trouve des agences de voyage à tous les coins de rues. Ce que j’ignorais, c’est que ces agences de voyage ne s’occupaient pas des visas pour les étrangers. Vous êtes chinois ; pas de problèmes, vous réservez votre billet d’avion et dans la foulée le visa pour votre pays de destination. Si vous êtes étranger, même accompagné d’une épouse chinoise, on vous répondra poliment « bu keyi », pas possible. La seule solution était donc d’aller à Guangzhou ou à Nanning, au consulat du Vietnam et de rester deux ou trois jours là-bas en attendant la délivrance du document.

Pré-visa pour le Vietnam

A moins d’utiliser les services d’une de ces agences de voyages en ligne qui proposent des pré-visas pour le Vietnam. Sur le papier l’idée est bonne puisqu’on vous propose pour une quinzaine d’euros d’enregistrer votre demande de visa auprès des autorités vietnamiennes et de vous envoyer une lettre d’approbation. Il suffit ensuite de vous rendre dans le Consulat du Vietnam que vous avez choisi, muni de cette lettre et on vous délivre votre visa dans la demi-heure qui suit. Naturellement, ce service ne présente aucun intérêt si vous arrivez au Vietnam par avion puisque les aéroports internationaux de Hanoi, Saigon et Danang ont un guichet Visa on arrival. En revanche, la solution peut-être tentante lorsqu’on emprunte une voie terrestre, comme par exemple le train de Nanning à Hanoi et qu’on a besoin d’un visa pour passer la frontière.

Malheureusement, comme j’en ai fait l’expérience, cette lettre de pré-approbation ne garantit pas la délivrance du visa dans l’heure qui suit, en effet, arrivé à Nanning un vendredi matin, j’ai présenté le document au Consulat de Nanning et on m’a demandé de revenir après le weekend pour chercher mon visa. Comme je râlais un peu, l’employée m’a précisé que si je voulais mon visa dans la journée, je devais payer le supplément «urgent», soit 200 Yuans de plus (30 €), ce qui ajouté aux frais de visa faisait 550 Yuans. Sans compter le coût de la « pre-approval letter ». Bref, comme j’avais déjà réservé mon billet de train pour Kunming, je n’avais pas le choix. J’ai réglé le total et une demi-heure plus tard, je quittais le Consulat avec mon nouveau visa. Moralité, j’aurais pu économiser les frais de pré-visas et j’aurais obtenu mon visa dans les mêmes délais en payant seulement le supplément « urgent ». La seule différence est que j’aurais dü remplir un formulaire et sans doute patienter quelques heures !

De Kunming à Lao Cai

Le chef de wagon accueille les passagers sur le quai de la gare de Kunming
Le chef de wagon accueille les passagers sur le quai de la gare de Kunming

Après la découverte de ces pré-visas que je ne conseille à personne, j’ai fait une autre découverte beaucoup plus intéressante pour les inconditionnels du train, comme moi, qui voyagent depuis la Chine vers le Vietnam. Jusqu’à récemment, la seule liaison existante était la ligne Nanning – Hanoi qui a d’ailleurs réduit la fréquence de ses trains à deux par semaines : le vendredi et le samedi en direction de Hanoi, et le jeudi et le vendredi en direction de Nanning. Depuis le début de l’année (2015), la ligne Kunming – Lao Cai est à nouveau en service. Pour ceux qui veulent se rendre dans les montagnes du nord-ouest Vietnam, c’est une bonne nouvelle car cela évite de passer par Hanoi, puis de prendre le tortillard qui relie Hanoi à Lao Cai. Il n’en fallait pas plus pour aiguiser ma curiosité et c’est la raison pour laquelle, je reprenais le train pour Kunming, le soir-même. Douze heures de train pour débarquer vers 10 heures du matin dans la gare de Kunming qui depuis les attentats Ouighours du printemps 2014 est sous très haute surveillance.

Restait à acheter un billet de train pour Hekou, la ville jumelle de Lao Cai, côté chinois. Dans les grandes gares chinoises, on trouve maintenant des guichets automatiques qui vous délivrent un billet en quelques minutes. Mais ces appareils ne sont pas faits pour les étrangers car pour le utiliser il faut d’abord lire le chinois et ensuite, d’après ce que j’ai compris, disposer d’une carte d’identité chinoise. Pour moi, la seule solution était donc d’aller faire la queue devant un guichet traditionnel. Et là, c’est un peu l’horreur. Imaginez un immense hall doté d’une vingtaine de guichets, et devant chacun d’entre-eux, une queue interminable qui s’étend jusqu’à l’extérieur. Il y a de quoi vous décourager, surtout quand on ne parle pas très bien le chinois et qu’on sait que ces guichets ferment à tour de rôle, de manière aléatoire, pour des poses de vingt minutes. On peut ainsi après avoir fait une demi-heure de queue se retrouver tout proche du guichet et voir l’employé placer son écriteau « fermé ». Dans ce cas, il n’y a qu’une solution, refaire la queue devant un autre guichet. Mais ce matin, à Kunming, c’était mon jour de chance ; pas de fermeture inopinée et une employée qui parlait anglais, à peu près, suffisamment pour me délivrer mon billet : un soft-sleeper pour Hekoubei.

La suite, c’est un voyage de 6 heures, confortablement installé dans un compartiment climatisé, un paysage sans intérêt, à l’exception de la dernière partie lorsque le train arrive dans les montagnes. Mais là, on a droit à une succession de tunnels jusqu’à l’arrivée à Hekoubei ; une gare flambant neuve, construite au milieu de nulle part, où débarquent la centaine de passagers qui pour la plupart se rendent au Vietnam.

Je suis cette petite foule et embarque dans une navette qui, je le suppose, nous emmènera vers le centre-ville. Effectivement, 1o minutes plus tard le bus fait un premier arrêt en ville. Où ? Je n’n sais rien. Mais l’agglomération étant petite, j’imagine que nous ne sommes pas loin du centre. Je laisse passer un ou deux arrêts et décide de descendre au suivant, en face de ce que je prend pour un hôtel mais qui s’avère être un hôpital. J’avais visé à peu près juste ; à deux cent mètres de là, je découvre un hôtel. C’est un hôtel typiquement chinois qui porte un nom vietnamien ; comptoir de réception avec ses cinq ou six horloges qui indiquent l’heure de New-York, Moscow, Beijing, Hanoi…, fauteuils et banquettes en bois massif, très inconfortables, et une employée, maquillée comme un camion volé, qui ne parle que le chinois (et sans doute le vietnamien). C’est un signe qui ne trompe pas ; quand on rencontre ces jeunes (et moins jeunes) femmes outrageusement maquillées, on n ‘est pas loin du Vietnam.

Mais quand on débarque dans un hôtel c’est généralement pour y trouver une chambre ; il suffit donc de savoir demander s’il y a des chambres libres et quels sont les prix. Mieux vaut aussi demander à voir la chambre si l’on veut éviter la mauvaise surprise d’une chambre sans fenêtre. Ensuite on vous demandera votre passeport et vous devrez payer le prix de la chambre, plus la caution pour la clé. Bref, rien de bien compliqué à condition de parler quelques mots de chinois ou d’utiliser le traducteur de votre Smartphone ou de votre tablette.

Au Xin Du Hotel (1, Binlang Road, Hekou), la chambre standard coûte 120 Rmb (18 €, environ) ; c’est le prix moyen pour une chambre de standing, en dehors des mégalopoles de Beijing, Shanghai et Guangzhou. Lits-jumeaux, bureau, fauteuil et table basse, avec l’incontournable plateau en osier et son assortiment de produits proposés en supplément du prix de la chambre : cigarettes, préservatifs, boissons énergisantes…. Bref, une chambre ordinaire qui pour une fois ne pue pas le tabac froid. D’ailleurs, sur la table de nuit, un petit panneau rappelle en chinois et en anglais qu’il est interdit de fumer dans le lit !

Le pont de l’amitié

Le lendemain, après une bonne nuit de sommeil, je récupère la caution de la clé et saute dans un taxi en direction de la frontière chinoise. Prix de la course 10 Yuans (1,5 €) pour deux petits kilomètres. C’et un peu cher payer mais lorsqu’on ignore où on se trouve exactement, ça permet de ne pas perdre son temps à tourner en rond. Bref, après cinq minutes de trajet, le taxi me dépose à proximité de la frontière chinoise : une rue barrée par un portail roulant, de l’autre côté duquel on découvre le Pont de l’Amitié qui relie les deux rives du fleuve et fait office de frontière, et sur la rive opposée, l’imposant bâtiment des services d’immigration du Vietnam.

Pour le moment, il est encore trop tôt et la frontière n’est pas encore ouverte. Et puis, tout à coup, on voit surgir côté Vietnam une foule de marchands qui traversent le pont au pas de course ; certains poussent des charrettes à bras chargées de fruits et de légumes, d’autres poussent des vélos tout aussi chargés, quant au simples piétons ils transportent leur marchandise sur le dos, dans de grands paniers en osiers, comme le font les montagnards de la région. Je regarde cette foule pressée de rejoindre la Chine et je pense tout à coup que je n’attends pas au bon endroit pour franchir la frontière. Effectivement, mieux vaudrait passer par les services de l’immigration qui se trouvent juste à côté.

Côté chinois, les formalités prennent un dizaine de minutes, et encore, c’est à cause de mon passeport que j’ai du faire remplacer à Guangzhou. Ensuite, je traverse à pied le Pont de l’Amitié et termine les formalités de passage côté Vietnam. En une demi-heure, l’affaire est pliée, et je me retrouve à Lao Cai où une poignée de chauffeurs de taxis attend le client pour le conduire à la gare, à Sapa ou ailleurs. Pour moi, ce sera Ga Lao Cai (la gare de Lao Cai) ce que j’indique au chauffeur de taxi qui charge mon sac dans le coffre. J’ai employé le mot « Ga » qui signifie « gare » en vietnamien et du coup mon chauffeur imagine que je parle couramment la langue. Trois minutes plus tard il me dépose devant la gare de Lao Cai et m’annonce le prix de la course en vietnamien 4000 VND. Heureusement, je comprends à peu près les chiffres et je lui donne un billet de 5000 VND, soit 25 centimes d’euros. J’ai eu droit au tarif local.