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Le blog

Chronique de Zhanjiang 22

La petite boutique de Changdi Lu

Le lendemain de mon arrivée à Wuhan, je descend à la réception de l’hôtel pour demander où se trouve le parc dont m’on parlé les joueurs de toupie du square. Par chance, j’ai bien compris le nom de l’endroit et la réceptionniste entreprend de m’expliquer comment y aller. Comme j’ai déjà arpenté le quartier dans la soirée et étudié le plan sur l’iPad, je comprends que c’est à un quart d’heure à pied. C’est tout ce que j’ai besoin de savoir avant de m’y rendre dans l’après-midi. Ce n’est pas le meilleur moment pour y rencontrer de joueurs de toupie mais ce sera l’occasion de faire un premier repérage.

Pintiang Park

Pintiang Park (Hankou Riverside Park) est un immense parc qui court sur plus de trois kilomètres le long de la rive du fleuve ; on y retrouve toutes les figures que l’on croisent habituellement dans les parcs des grandes villes chinoises, les retraités qui font leur excercice quotidien, les collégiens et étudiants qui déambulent par petits groupes, les jeunes couples qui se bécottent sur les bancs publics à défaut de pouvoir faire ça dans l’appartement familiale… on y rencontre aussi des jeunes femmes en rollers qui slaloment entre les promeneurs, les écouteurs de leur iPhone dernier modèle vissés dans les oreilles, et des jeunes cadres en chemise blanche qui font la pause à l’heure du déjeuner. Mais à l’heure où je visite le parc, de joueurs de toupie il n’y a point. Si, j’en déniche finalement un après avoir presque bouclé ma promenade de six kilomètres.

Encore une fois c’est le bruit du fouet qui m’a alerté, et encore une fois je me suis laissé abusé. L’homme joue au jokari avec une vieille raquette de badminton et une balle de tennis attachée par un élastique à sa toupie qui sert de lest. Mais il a aussi un de ces bâtons que j’ai découvert la veille. Il me regarde arriver d’un air circonspect, déballer mon matériel et lancer ma toupie. Pour cet habitué de Pintiang Park, mon comportement frise l’hérésie ; à Wuhan on ne joue pas à la toupie avec un fouet de fitness mais à l’aide d’un bâton comme le sien. Il m’entreprend sur le maniement du bâton dans un discours auquel je ne comprends pas grand-chose ; suffisament tout de même pour deviner ce qu’il raconte : « tu dois acheter un bâton à la boutique de Changdi Lu ; c’est comme ça qu’on joue à la toupie ici ! ».

Cette fois j’ai pris mes précautions et mis dans mon sac un bloc-note et un stylo ; je le lui tends en disant « qin xie » (s’il te plait, écris). Il note l’adresse de la boutique (du moins, c’est ce que j’imagine) et me rends mon bloc en insistant sur le nom de l’arrêt de bus auquel il faut descendre. Ça, je l’ai compris. Pour le reste, l’adresse est en chinois et je suis incapable de la déchiffrer. Il va falloir que je dérange une fois de plus la responsable du Gishasha Hostel où j’ai posé mes bagages.

Du côté de Minqian Lu

Après le « malentendu » concernant la chambre lors de mon arrivée, la responsable du Gishasha Hostel se révèle charmante et prête à se mettre en quatre pour m’aider. Je l’ai déjà bombardée de questions dans la matinée et je reviens pour lui soumettre une nouvelle requête : comment trouver cette boutique dont l’homme de Pintiang Park a grifonné l’adresse.

Pas de problème. Plutôt que de faire un long discours auquel je ne comprendrai pas grand-chose, elle me fait signe de la suivre en dehors de l’hôtel. Nous marchons quelques minutes jusqu’à la station de bus où elle me montre la ligne numéro 7 et m’indique la station où je dois descendre. Je renonce à noter sur mon bloc-note le nom de la station et me contente de compter les arrêts ; si le bus effectue bien tous les arrêts et si la liste des arrêts affichée à l’arrêt de bus est exacte, je devrais arriver à bon port.

Après un quart d’heure de voyage, un œil rivé sur le navigateur GPS de l’iPad et l’autre sur la rue à compter les arrêts, le bus arrive à destination ; un quartier commerçant où s’alignent sans fin les boutiques de matériel électrique, câbles, prises, disjoncteurs, armoires éléctriques… La suite ne va pas être facile car je n’arrive pas à trouver la rue notée sur mon bout de papier. Je demande une première fois mon chemin et on m’envoie à gauche, je demande une seconde fois et on me fait comprendre que je dois rebrousser chemin ; je demande une dernière fois à des policiers qui patrouillent en voiture électrique et eux m’envoient encore dans une autre direction. Finalement, lassé d’arpenter ce quartier en long, en large et en travers, je demande à un moto-taxi « ni zidao ma ? » (tu connais?). L’homme acquiesce et je m’installe derrière lui. « zho ba ! » (on y va). Trois minutes plus tard et cinq cent mètres plus loin, mon chauffeur me dépose à l’entrée d’une ruelle située juste à côté de l’arrêt de bus où je suis descendu une heure plus tôt. Il me demande 6 Yuans, ce qui est hors de prix pour la distance parcourue ; je lui en donne cinq en ajoutant « tai gue le » (trop cher) et je m’engage dans la ruelle.

Ici encore, on fait dans le matériel électrique et je commence à penser que l’homme de Pintiang Park m’a donné une fausse adresse. Je parcours la ruelle dans un sens puis dans l’autre et au moment où je suis sur le point d’abandonner, je demande à un commerçant ; il me montre une échoppe en face de sa boutique et me dit « c’est là ».

La Boutique de Changdi Lu
La Boutique de Changdi Lu

Effectivement, je tourne la tête et découvre la boutique en question, située en retrait de la rue principale, au croisement de deux ruelles. C’est une simple échoppe dont l’étal ne fait pas deux mètres de largeur et qui propose en vrac, des cutters, des mètres pliants, et au milieu d’un fatras d’outils, des bâtons pour jouer à la toupie et sur une petite étagère une vingtaine de toupies de toutes formes et de toutes tailles. Moi qui imaginais une boutique en dur, j’aurais pu passer quinze fois devant l’endroit sans le repérer. Mais à présent que je connais l’adresse, je pourrai y revenir dans dix ans, les yeux fermés. J’achète deux bâtons, une corde de rechange, discute quelques instants avec le marchand et prend le chemin du retour.


Un retour qui ne devrait pas poser de problème puisqu’en toute logique il suffit de prendre le bus numéro 7 dans l’autre sens. Mais ce que j’ignore, c’est que le bus Numéro 7 n’emprunte pas le même itinéraire à l’aller et au retour. Alors que nous approchons du quartier de l’hôtel et que je compte les arrêts, le bus change de direction et file plein nord. Le temps que je réalise ce changement de cap, le bus a déjà parcouru un bon kilomètre, et lorsque je descend enfin à l’arrêt suivant, je me retrouve en terrain inconnu. Pas tout à fait, grâce au GPS de l’iPad qui m’indique l’endroit où je me trouve, mais trop éloigné de l’hôtel pour rentrer à pied. Finalement, je me mets en quête d’un taxi qui me ramènera au bercail après avoir fait un copieux détour. Mais c’était sans doute à cause de mon accent chinois détestable ; je lui ai indiqué « Tianjin Lu » et il a compris « Tanjing Lu ».

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