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Le blog

29 Janvier 2013

En route vers Pak Beng

De Luang Prabang à Pak Beng, il y a environ huit heures de navigation. Mais sur le fleuve comme sur la route, on n’est jamais sur de rien. Une avarie de moteur, une panne d’essence, et la durée du voyage peut se voir rallonger de manière conséquente. Ainsi, lors de notre première remontée du Mékong, une panne de moteur nous a immobilisé quelques heures à seulement un quart d’heure de navigation de Huay Xai.

Pour le moment, nous quittons simplement Luang Prabang et c’est déjà le premier arrêt. A quelques encablures de la cité, notre slow boat accoste la rive pour prendre de nouveaux passagers. Ici, ce ne sont pas des touristes mais de « locaux » qui embarquent avec armes et bagages. Ils s’installent à l’avant du bateau sur des nattes en bambou et le bateau reprend sa route.

Une heure heure plus tard, nous sommes dépassés par le premier « speed boat » ; un de ces hors-bords à la ligne effilée comme une lame de couteau qui remonte le fleuve à toute allure. A bord, cinq passagers coiffés de casque de moto se cramponne à leur siège pour ne pas être éjécté. Si leur bolide ne tombe pas en panne, dans moins de cinq heures ils seront à Huay Xai. A moitié sourds, trempés et courbaturés, mais ils auront gagné une journée et demi sur un trajet qui prend deux jours et se seront donnés quelques frissons.

Sur notre slow boat, le voyage se poursuit paisiblement le long des méandres du fleuve. A l’avant du bateau, perché sur un haut tabouret, le pilote tient la barre, scrutant les eaux du fleuve d’un œil attentif. En pleine saison sèche, le niveau du Mékong est au plus bas et il faut des années d’expérience pour déjouer les traitrises du fleuve, éviter les bancs de sable, les rochers affleurant la surface, et franchir les rapides sans mettre le bateau en travers du fleuve. Mais notre pilote est un vieux de la vieille qui connaît cette portion du Mékong comme sa poche. Sans aucun de ces instruments de navigation moderne, il vous indiquera avec précision la distance parcourue, la profondeur de l’eau et la force du courant. A condition de parler Lao bien sûr.

Faute de parler Lao et de disposer de points de repères, après quelques heures de navigation nous sommes perdus. Pas tout à fait car grâce à l’iPad et son GPS nous allons découvrir notre position : un petit point bleu qui se déplace lentement sur une carte sommaire de la région. C’est suffisant pour constater que nous progressons en direction de Pak Beng et que nous sommes déjà à mi-parcours. Le pilote a cédé la place à son second pour déjeuner et nous en faisons autant pendant que le bateau poursuit sa route.

L’après-midi sera aussi calme mai jamais ennuyeuse ; il se passe toujours quelque chose sur le fleuve ou sur ses rives ; il suffit de regarder. Ce sont les bateaux chargés de sable ou de graviers qui descendent vers Luang Prabang et continueront leur route vers le delta. Ce sont des enfants surgis d’on ne sait où, qui dévalent la colline pour regarder passer le slow boat, ou encore une courte escale au milieu de nulle part pour déposer une famille qui revient de la ville. On croise aussi parfois des paysans sur leur pirogue qui file au ras de l’eau, ou des jeunes moines qui ont abandonné leur robe safran pour aller se laver dans le fleuve. Plus loin, des femmes font leur toilette, pudiquement enveloppées dans un morceau d’étoffe.

Escale à Pak Beng

Le soleil a presque disparu derrière les montagnes lorsque nous arrivons à Pak Beng. Difficile de se tromper, même si on ne connaît pas l’endroit. C’est en effet la première « ville » que l’on rencontre lorsqu’on remonte le fleuve depuis Luang Prabang : un amas de maisons perché en haut d’une colline escarpée, et la concentration de slow boat amarrés sur la rive en contgrebas ne laisse aucun doute.

Effectivement, après une approche qui semble interminable, le bateau rejoint l’embarcadère, aussitôt envahi par les débardeurs, les guides, les chauffeurs de tuk-tuk et autres rabatteurs qui proposent leurs services avec plus ou moins d’insistance.

Comme nous avons déjà réservé une chambre pour la nuit, a priori, nous n’avons besoin de personne. Sauf que, pour rejoindre l’entrée de la ville, il y a trente mètres de dénivelé et un méchant escalier qu’on gravit difficilement lesté de vingt kilos de bagages. Un jeune « sherpa » s’empare des deux sacs à dos et commence à gravir la colline. Arrivé au sommet, il pose les sacs, attends que je le rejoigne et me demande 5000 Kips. Je le paie en râlant un peu. Après six semaines de voyage, nous avons pris les mauvaises habitudes du touriste occidental qui visite l’Asie.

Pak Beng est une ville très particulière que la plupart des voyageurs ne découvrent que le temps d’une escale en remontant ou en descendant le Mékong. En effet, c’est un cul-de-sac desservi par une route unique qui met la ville à 10 heures de route de Luang Namtha au nord du Laos, et 15 heures de Luang Prabang. Le moyen le plus simple d’y accéder est donc le bateau.

La ville est batie sur un escarpement, qui la mets à la l’abri des crues du fleuve, et s’étend le long d’une rue principale qui continue de grimper et qui plus loin devient la route de Luang Namtha. C’est dans cette rue principale que nous devrions trouver la guesthouse dans laquelle nous avons réservé une chambre.

Effectivement, nous la trouvons à cinq cents mètres du port, déjà prise d’assaut par des passagers qui ont débarqué avant nous et qui ont constaté que la plupart des guesthouses proches de l’embarcadère étaient soient déjà complètes, soit hors de prix, soit encore dotées d’un confort plus que rudimentaire. Mais notre réservation vaut le meilleur des coupe-file qui me laisse même le choix de la chambre. Je visite, choisis, laisse mon passeport, prends la clé et rejoins ma femme qui attend avec nos sacs en bas de la ville.